Accélérateur
de projets

3 July 2023

Faire de la valorisation patrimoniale, un enjeu territorial, sociétal et environnemental. – Correspondances

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Le mardi 14 mars, le Louvre Lens Vallée, Perles d’histoire et {CORRESPONDANCES DIGITALES] ont organisé un voyage apprenant à Lens et à Douai à destination d’une vingtaine de responsables du patrimoine en charge de valoriser les archives, les collections et les savoir-faire de leurs entreprises et institutions. Issus de secteurs particulièrement variés (luxe, bijouterie, viticulture, banque, immobilier, aéronautique, etc.), un programme riche leur a été proposé pour découvrir, partager et échanger sur les différentes approches patrimoniales de ce territoire des Hauts-de-France. ils ont ainsi pu découvrir le Louvre Lens Vallée, le centre de conservation du musée du Louvre (localisé à Lens), le Galibot (un hôtel-restaurant créé dans un ancien coron) et l’atelier du Livre d’art et de l’Estampe de l’Imprimerie nationale.

1. FAIRE DES PATRIMOINES D’UN TERRITOIRE, UN TERRAIN D’EXPÉRIMENTATION, DE DÉVELOPPEMENT ET DE PARTICIPATION : L’EXEMPLE DU LOUVRE LENS VALLÉE.

ETAPE 1 DU VOYAGE – Margherita Balzerani, directrice du Louvre Lens Vallée, accueille les participants de notre voyage.

Créé il y a 10 ans par la Communauté d’Agglomération de Lens-Liévin pour dynamiser le territoire à la suite de l’implantation du Musée du Louvre-Lens, LLV est un incubateur et un accélérateur de projets culturels dans le domaine de l’artisanat, des métiers d’art, de la médiation, de la conservation et du tourisme.

Le Louvre Lens Vallée, un accélérateur dédié aux expérimentations et à la découverte des outils numériques dans le secteur des industries culturelles et créatives.

Depuis sa création, l’incubateur a accueilli plus de 150 entreprises. Parmi celles-ci, certaines œuvrent à la valorisation et à la diffusion de l’identité du territoire lensois. C’est le cas, par exemple, de la marque Gueule Noire accompagnée par LLV qui propose des vêtements logotypés pour marquer le sentiment d’appartenance au bassin minier. D’autres, travaillent à la conception de solutions de préservation et de valorisation patrimoniale. Parmi les entreprises qui ont été accompagnées jusqu’alors, peuvent être citées Gigascope dans la numérisation 3D, Onyo et Saola pour l’immersion numérique et sensorielle ou Protomotech, solution de suivi climatique en temps réel utilisée au Centre de conservation du Louvre. 

Outre l’accompagnement de ces entreprises, LLV, véritable lieu d’intelligence collective, a mis en place depuis 2018 un atelier laboratoire avec l’Université d’Artois (le Museolab) où se retrouve artistes, artisans et étudiants pour expérimenter et mettre en place des projets de médiation au service des 85 musées implantés en Hauts-de-France.

Le Culturathon, un événement annuel pour rassembler les forces vives du territoire afin d’expérimenter et identifier des projets innovants.

Au-delà de son rôle d’incubateur, le Louvre Lens Vallée contribue à dynamiser le tissu entrepreneurial et créatif local par une politique événementielle riche et incitative. C’est notamment le cas du Culturathon qui, pour sa 6e édition (octobre 2022) a permis de réunir près de 70 étudiants venus travailler de manière collaborative pendant 36h avec de nombreux professionnels issus du Ministère de la Culture, du Louvre-Lens, du 9-9bis, du Main Square Festival, de Culture Commune (scène nationale), d’Arkéos (musée-Parc archéologique de Douai)… Ces collaborations ont permis d’identifier de nombreuses pistes pour améliorer la politique éco-responsable de ces différents opérateurs culturels. 

De telles initiatives ont permis de partager avec les participants un ensemble de pratiques participatives qui pourraient être mises en œuvre dans leurs différents champs d’activités. Ces projets participatifs pourraient contribuer à mettre en lien les patrimoines et savoir-faire dont ils ont la charge avec des enjeux plus sociétaux et environnementaux. Suite à cette première ouverture, la délégation s’est rendue au centre de conservation du Louvre pour échanger sur les bonnes pratiques mises en œuvre dans ce centre de conservation hors normes.

2. FAIRE DE LA PRÉSERVATION DES COLLECTIONS, UN LIEU D’ETUDE ET DE FORMATIONS : QUELQUES BONNES PRATIQUES PARTAGÉES AVEC LE CENTRE DE CONSERVATION DU LOUVRE.

ETAPE 2 DU VOYAGE – Marie-Lys Margueritte, Directrice déléguée du Centre de conservation a fait découvrir à nos participants ce lieu exceptionnel de conservation et d’étude. 

Situé à quelques mètres du Louvre Lens, le centre de conservation accueille les collections parisiennes de l’établissement délocalisées à 204 kilomètres de Paris. 40 000 mètres carrés sont ainsi consacrés à conserver, protéger, restaurer et étudier environ 270 000 œuvres faisant de ce centre l’un des plus grands d’Europe.

Le Centre de conservation du Louvre à Liévin.

Quelques mots, d’abord, sur la genèse de ce projet. Située en bordure de Seine, la réserve des collections à Paris n’était pas à l’abri des crues centennales. Face à ce risque, l’idée a émergé dès 2009 d’externaliser les réserves (initialement à Cergy) et de les réunir en un seul endroit pour leur assurer le même niveau de conservation. A partir de 2013 et l’ouverture du Louvre Lens, il a été décidé de pérenniser les actions lancées à cette occasion en construisant le centre de réserve en région Hauts-de-France. Le chantier démarra alors en 2016.

La délégation à la découverte du Centre de conservation du Louvre.

2,5 ans de travaux ont donc été nécessaires pour construire ce bâtiment pour un budget de 60 millions d’euros financé par la Région Hauts-de-France en fonds propres, le programme européen FEDER, des apports du Louvre et du Ministère de la culture ainsi que du mécénat (à hauteur de 5%).

Désormais ouvert, le centre de conservation est à la fois un espace logistique (6 espaces de réserve sur 9 600 m²), un lieu de restauration et d’études. 11 ateliers sont ainsi à la disposition des restaurateurs et des chercheurs – 70 professionnels sont accueillis par mois en moyenne. Il conserve les collections du Louvre mais aussi temporairement les collections de musées territoriaux (sur avis des services scientifiques des départements en charge des collections). Le centre accueille  aussi des formations en relation étroite avec l’Institut national du Patrimoine, l’Ecole du Louvre ou avec les universités de Lille, Amiens ou Arras. Une équipe de 15 permanents anime le lieu, accueille les professionnels et s’occupe des opérations logistiques. A contrario des réserves visitables du Louvre Lens, celles-ci ne sont malheureusement pas ouvertes au public.

Face aux enjeux liés à la crise énergétique, le centre de conservation s’est attelé entre 2020 et 2023 à réduire sa consommation énergétique (- 15%). Sa production de déchets a aussi été optimisée grâce au réusage des matériaux utilisés (réutilisation des caisses de stockage, reconditionnement des mousses, etc.) et à des tests préalables de conditionnement avant utilisation. Enfin, pour éviter le développement de flux logistiques conséquents, le déplacement des professionnels a été favorisé à celui des réserves.

Ce deuxième temps a ainsi permis d’échanger entre professionnels sur des bonnes pratiques en termes de conservation mais aussi d’étude et de valorisation patrimoniale des collections respectives de leurs entreprises et institutions. Cette visite fut aussi l’occasion d’échanger sur la mise en place de normes de conservation plus vertueuses en termes de respect de l’environnement. Le temps du déjeuner a, quant à lui, favorisé la découverte d’un lieu-témoin de l’histoire du bassin minier lensois.

3. FAIRE D’UN LIEU PATRIMONIAL, UN LIEU DE VIE : DÉCOUVERTE D’UN HÔTEL / RESTAURANT DANS UN ANCIEN CORON.

ETAPE 3 DU VOYAGE – Le restaurant de l’Hôtel Louvre Lens (Le Galibot) nous accueille pour le déjeuner.

En face du Louvre Lens, cet hôtel-restaurant, situé dans un coron, témoigne du passé minier de l’agglomération. Anciennement baptisé Cité 9, ce corps de bâtiment d’une longueur de 110 mètres était alors composé de 26 maisons habitées par des mineurs.

L’Hôtel du Louvre-Lens, un ancien coron réhabilité en hôtel-restaurant.

Dans le respect du lieu, un hôtel 4 étoiles y est désormais installé depuis novembre 2018. Les différentes maisons du coron ont été réhabilitées pour donner place à 52 chambres. Ces chambres et les espaces communs rappellent ce passé minier  grâce à un choix de matériaux opéré par les architectes (Guillaume Da Silva et Claire Duthoit) en charge de cette réhabilitation : chêne, pierre bleue brute, planchers fait en anciens chemins de fer du début du siècle, le bar en étain ou encore carreaux de ciment. 

L’hôtel est désormais exploité par le gestionnaire spécialisé Esprit de France. A proximité, une résidence d’artistes est en cours de construction. 

Ce troisième temps a favorisé des échanges conviviaux mais aussi la visite d’un lieu inédit pour provoquer les échanges entre les participants sur les mutations possibles que peuvent envisager certains lieux patrimoniaux. Un autre exemple de mutation à l’œuvre a été abordé avec la visite de l’atelier de l’Art et de l’Estampe de Douai.

4. FAIRE DE SAVOIR-FAIRE ANCESTRAUX, UN LIEU DE PATRIMOINE VIVANT : LES PROJETS DE L’ATELIER DU LIVRE D’ART ET DE L’ESTAMPE DE L’IMPRIMERIE NATIONALE.

ETAPE 4 DU VOYAGE – Visite privée avec la Directrice Marie Manuel de Condinguy, des membres de l’Atelier et de Luc Bernard, Directeur scientifique et culturel de l’agglomération Douaisis, Directeur d’Arkéos Parc Archéologique.

L’atelier du Livre d’art et de l’Estampe a été créé en 1640, il est considéré comme le plus ancien atelier d’imprimerie au monde encore en activité.

Au cours de la visite de l’atelier du Livre d’art et de l’Estampe

Dotées de solides compétences qui couvrent tout le spectre de la chaîne typographique (dessin, gravure et fonte de caractères, composition et impression typographique) ainsi que l’impression en taille-douce, les équipes de l’atelier du Livre d’art et de l’Estampe sont composées d’une dizaine d’artisans et de maîtres d’art. Ils développent des projets au service des institutions, des entreprises, des éditeurs et des artistes : livres de création et de bibliophilie, estampes, produits de luxe, caractères identitaires exclusifs, expositions temporaires… 

Pour mener à bien ces différents projets, une collection de 35 000 ouvrages, de 500 000 poinçons, une centaine de presses d’impression typographiques, lithographiques et de taille-douce. Ces nombreuses machines particulièrement anciennes sont encore utilisées par les équipes de l’Atelier. Fort de ce savoir-faire unique, des formations sont souvent proposées aux étudiants et aux professionnels.

Compte tenu de ces différents atouts, un musée vivant sera créé en 2026 pour valoriser ces collections, ces machines et, surtout, ses savoir-faire. Situé près de la gare, ce nouveau lieu aura pour vocation de proposer un parcours de visite et des ateliers pour favoriser une approche pratique et expérimentale à ses visiteurs. Ce nouveau lieu développera de riches liens avec les autres équipements du territoire : bibliothèque municipale de Douai, Legendoria (lieu de création artistique autour des contes et des légendes), Arkéos (musée-parc archéologique) et Orionis (planetarium dont l’ouverture est prévue en mai 2023).

Ce voyage apprenant a ainsi mis en lumière une variété de formes de valorisation patrimoniale. Cette variété est dûe à la richesse patrimoniale tant naturelle, que bâtie ou immatérielle de ces territoires. Elle témoigne de nombreux savoir-faire, de lieux emblématiques, d’œuvres et de collections en cours de patrimonialisation issus de ces territoires mais aussi récemment accueillis depuis une dizaine d’années.  Une telle diversité est dûe aussi à la multiplicité des approches qui ont été engagées pour bâtir de nouvelles offres culturelles mais aussi faire de cette richesse patrimoniale, un terroir d’expérimentations, de développements et de prospectives pour accompagner la reconversion touristique et culturelle des territoires lensois et douaisiens.