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3 juillet 2023

3 QUESTIONS A : Karine MARCHADOUR (Cité du Vin de Bordeaux)

Table des matières

Ouverte en juin 2016, la Cité du Vin de Bordeaux propose à ses visiteurs un parcours permanent de 3 000 m², composé de 18 modules répartis sur 6 univers thématiques. Suite au renouvellement de ce parcours, inauguré début février 2023, Antoine Roland s’est entretenu avec Karine Marchadour, responsable de la médiation culturelle et de l’accessibilité de la Cité du Vin sur les enjeux et la façon dont a été réalisée cette nouvelle Exposition permanente.

AR – QUELS ONT ÉTÉ LES ENJEUX DE LA REFONTE DE VOTRE PARCOURS PERMANENT ?

KM – Depuis l’ouverture de la Cité du Vin en 2016, notre plus grand enjeu est la satisfaction de nos visiteurs. Or, avec la crise sanitaire, nous avons senti que les publics avaient besoin de plus de matérialité, de choses vécues et d’émotions. Par ailleurs, le projet scientifique et culturel de la Cité du vin s’est enrichi depuis quelques années sous l’impulsion de Véronique Lemoine, notre responsable scientifique. En phase avec ce projet culturel, il s’avérait donc nécessaire de remettre au centre de notre parcours le vivant et le lien homme / nature ainsi que les enjeux liés aux dérèglements climatiques. Pour finir, nous avons eu l’opportunité financière d’envisager la refonte progressive de notre parcours permanent via la Région et la mobilisation du fonds React-EU (avec pour condition de finaliser cette refonte en 2023 !).

Le parcours de visite de la Cité du Vin.

Trois raisons qui ont œuvré à prendre la décision en 2021 de réajuster ce parcours pour mieux satisfaire nos publics et leur donner envie de (re)venir découvrir la Cité du Vin grâce à une expérience de visite plus accessible, participative et ludique. 

Il nous semblait aussi essentiel de maintenir le saut créatif et technologique que nous avions déjà accompli à l’ouverture de la Cité du vin.

Enfin, cette nouvelle Exposition permanente était l’occasion de rééquilibrer la structure de ce parcours dans sa globalité tout en maintenant une cohérence esthétique globale. Celui-ci démarrait jusqu’alors avec un début de visite trop riche en contenus et en durée qui ne permettait de profiter de la richesse de l’ensemble du parcours…

AR – COMMENT ET AVEC QUI AVEZ-VOUS TRAVAILLÉ POUR CETTE REFONTE ?

KM – Nous avons d’abord réalisé un ensemble d’études des publics tant qualitatives que quantitatives. D’un point de vue quantitatif, notre compagnon de visite nous a permis d’identifier la durée des parcours réalisés par nos visiteurs et leurs centres d’intérêts. En parallèle de cette analyse, des étudiants de Kedge Business School ont mené de nombreux entretiens qualitatifs post-visites. Enfin, des focus groupes avec des visiteurs bordelais et non bordelais animés par 100% quali, pour mieux saisir leur perception de la Cité du vin: ce qu’ils avaient visité, ce qui leur restait de cette visite, ce qu’ils avaient envie d’y trouver.

Cette base nous a permis d’analyser, noter et imaginer de nouvelles expériences à mettre en œuvre en les caractérisant selon leurs types d’entrées : cognitives, émotionnelles, corporelles ou esthétiques. Dès le début, ce travail a été mené avec trois regards complémentaires : le regard scientifique (Véronique Lemoine), celui plus muséographique (Marion Eybert et Laura Dubosc) et celui de la médiation des publics et de l’accessibilité. Ce comité a donc analysé et réécrit le projet muséographique en précisant à chaque fois l’expérience attendue : les messages clés, les pistes muséographiques et scénographiques à envisager, le type d’entrées à privilégier (ludique, corporelle, etc.)…

Une fois le projet muséographique défini, différents prestataires ont été recrutés pour, d’un côté, renouveler les contenus de 8 modules sans toucher à leur scénographie, de l’autre, renouveler la scénographie de 7 modules. Le renouvellement d’une partie de la scénographie a coûté environ 1,8 millions d’euros et la production audiovisuelle environ 1,2 million.

Pour mener ce chantier « contenus », différentes sociétés ont été mises à contribution : Sim&Sam et Maud Martinot (scénographie) pour le module « A table », The Mill pour « Le vin à la conquête du monde », Clap 35 pour le module «Terroirs du monde », Blue Yeti pour « Six familles de vin » et Films d’ici pour « Ca tourne ! », « Ca peut servir ! », « Allée des tendances » et « Saga de Bordeaux ».

Le module A table, modifié dans ses contenus – © Casson Mann, Maud Martinot, Sim&Sam

Pour le chantier « Contenus + scénographie », un marché conception / réalisation a été passé avec Clémence Farrel, Ich&Kar (à la direction artistique), The Mill à la production audiovisuelle et Illusio (pour les interactifs). Pour mettre en place ces nouveaux modules, la Cité a dû fermer pendant un mois en janvier.

Le nouveau compagnon de visite de la Cité du Vin.

Enfin, le compagnon de visite a été développé par notre équipe DNSI (10 personnes). Notre nouveau compagnon de visite facilite la personnalisation du parcours par le visiteur, il peut sélectionner sa langue (8 langues possibles), la durée de son parcours (entre 1h et 3h) et le choix des thématiques qui l’intéresse, son handicap si besoin (audiodescription, transcription et langage facile). 

AR – QU’EST CE QUI CARACTÉRISE CE NOUVEAU PARCOURS ?

KM – Ce parcours est plus accessible, plus clair et plus chaleureux. Nous avons facilité l’accès aux contenus de manière plus évidente et d’après les premiers retours, les visiteurs apprécient beaucoup cela.

Parmi ceux que nous avons souhaité faire évoluer : 

Nous avons réduit et gommé les écrans pour donner une place plus grande à une approche matérielle et émotionnelle. Sur ce point, nous avons donc réduit le nombre d’écrans au profit de la multiplication de surfaces de projection différentes. Nous avons aussi eu à cœur de ramener des éléments tangibles dans le parcours : terre, grappes de raisin en cire, etc.

Projection sur un globe d’informations pour réduire le nombre d’écrans ©ANAKA / Cité du Vin / Agence Clémence Farrell / The Mill / Ich&Kar

Il nous a fallu aussi redéployer les contenus dans nos différents espaces de visite et travailler à leur répartition dans l’espace pour fluidifier le parcours du visiteur. C’est le cas des contenus qui étaient jusqu’alors abordés dans la mezzanine, balayant plusieurs sujets. Nous les avons harmonisés et centrés sur une thématique unique, l’art de vivre, abordée de différentes manières. 

Sans forcément supprimer de sujets, nous avons aussi souhaité mieux les traiter pour en faciliter la compréhension. C’est le cas, par exemple, du processus de l’élaboration du vin qui était jusqu’alors morcelé dans trois dispositifs. Il a donc été rassemblé dans une expérience complète et claire pour le visiteur, qui illustre physiquement le processus (du chai, à la cuve jusqu’à la cave).

Mise en avant du processus d’élaboration du vin de façon plus claire dans le nouveau parcours de la Cité du Vin- © Agence Clémence Farrell, Ich&Kar, The Mill, Ilusio

Enfin, en application avec notre politique RSE, nous avons fait le choix de donner la possibilité à des associations ou structure culturelles de récupérer des éléments scénographiques de notre ancien parcours, tout en menant une réflexion active sur la consommation énergétique de la nouvelle exposition (moins de serveurs, moins d’écrans, etc.).

Un grand merci à Karine Marchadour pour son temps et sa disponibilité.